/2024

  • JO 2024 : jour par jour, la carte des restrictions de circulation à Paris et en Ile-de-France cet été
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/05/30/jo-2024-jour-par-jour-la-carte-des-restrictions-de-circulation-a-paris-et-en

    DÉCRYPTAGE Visualisez l’évolution des périmètres de sécurité mis en place à l’occasion des Jeux olympiques et paralympiques en région parisienne, du 15 juillet au 8 septembre.

    #JO #Paris #privatisation #sécurité #media_préfectoral

  • Raphaël Glucksmann expulsé du 1er mai : et la violence du PS on en parle ?
    https://www.frustrationmagazine.fr/glucksmann-mai-violence-ps

    Hier avait lieu le 1er mai, la grande fête des travailleuses et des travailleurs, qui célèbre leurs luttes et leurs conquêtes sociales. Comme tous les ans sous Macron, cette fête a été entachée par de nombreuses violences policières : nasses illégales, charges abusives, grenades lacrymogènes lancées aléatoirement, coups de matraques arbitraires… Toutes et tous ceux […]

    • Récupération électoraliste : épargner les communistes, accuser les insoumis

      À peine remis de ses émotions, Raphaël Glucksmann, que l’on a jamais vu dans aucune lutte sociale, n’a pas oublié ce pourquoi il était venu initialement : faire de la grosse récup’ électoraliste. Il s’est donc empressé d’accuser “les insoumis” et Révolution permanente.

      Oui sauf que voilà, l’action a été revendiquée par les Jeunes Communistes de la Loire. Léon Deffontaines, tête de liste PCF pour les élections européennes, a nié l’implication des communistes et a déclaré que les militants concernés seraient exclus le cas échéant. On comprend en effet que le Parti communiste, parti historiquement marxiste-léniniste et révolutionnaire, soit outré par quelques jets de peinture…

      Le Parti socialiste est l’ennemi des travailleuses et des travailleurs

      Visiblement après près d’un siècle de trahisons, les socialistes sont toujours surpris de n’être pas les bienvenus à la fête des travailleuses et des travailleurs.

      Chloé Ridel, porte-parole du Parti Socialiste, constatant que son candidat est détesté du peuple de gauche a par exemple déclaré : “Cette « gauche » la plus bête du monde qui, le jour de la fête des travailleurs, s’en prend à un candidat de gauche alors que l’extrême-droite est à 40% dans les sondages.” Si les personnes de gauche détestent un candidat ce n’est pas la faute du candidat, ce n’est pas lui qu’il faut changer, ce sont les personnes de gauche. Cela nous rappelle l’amusante citation de Bertolt Brecht : “Puisque le peuple vote contre le Gouvernement, il faut dissoudre le peuple”. Mais la gauche la plus bête du monde c’est le Parti Socialiste. Elle est si bête qu’elle ne comprend toujours pas pourquoi elle est honnie, pourquoi elle est obligée de partir en courant sous les huées pendant la fête des travailleurs. Petit rappel donc.

      Le Parti socialiste est notamment le parti auteur des Lois de Sécurisation de l’Emploi (2013), de la loi Rebsamen (2015) et de la loi El Khomri dite “Loi Travail” (2016) qui ont eu des conséquences désastreuses pour les travailleuses et les travailleurs en renforçant drastiquement le pouvoir patronal.

      Le Parti socialiste est notamment le parti auteur des Lois de Sécurisation de l’Emploi (2013), de la loi Rebsamen (2015) et de la loi El Khomri dite “Loi Travail” (2016) qui ont eu des conséquences désastreuses pour les travailleuses et les travailleurs en renforçant drastiquement le pouvoir patronal. Cette dernière loi, dans la continuité des précédentes, a en effet donné une primauté aux “accords d’entreprises” vis-à-vis des “accords de branche” sur tout un ensemble de sujets, ce qui signifie concrètement qu’elle a rendu le rapport de force extrêmement défavorable aux salariés. Elle a aussi créé les “accords de préservation ou de développement de l’emploi” (désormais “contrats de performance collective”) qui, comme l’explique Céline Verzeletti, secrétaire confédérale de la CGT, permet à l’entreprise en cas de ralentissement de son activité, “de modifier les contrats de travail en agissant sur la rémunération, la mobilité ou le temps de travail. En cas de refus, le salarié récalcitrant s’expose à un licenciement”. Sans surprise, selon elle, le bilan est celui d’un « usage très abusif de ces contrats de la part des employeurs » qui n’ont plus à « justifier des difficultés économiques de l’entreprise comme c’était le cas auparavant. »

      En prenant la défense de son poulain, Carole Delga, présidente PS de la région Occitanie, nous a elle appris que “nous sommes aux côtés des syndicats partout en France pour les droits sociaux”. On se demande ce qu’en pensent, par exemple, les syndicalistes de Goodyear qui furent condamnés pour l’exemple, en 2014, sous un gouvernement PS, à de la prison ferme pour avoir retenu quelques heures des DRH, afin de les contraindre à négocier. Les DRH en question ayant retiré leur plainte, c’est bien le parquet qui était responsable de la condamnation. L’avocat des salariés l’expliquait : “je ne peux pas croire que le parquet, qui avait réclamé de la prison ferme, ait élaboré son réquisitoire en dehors de tout cadre fixé par le gouvernement”. La CGT Goodyear d’Amiens-Nord ne s’y était pas trompée, voyant dans ce jugement une “arme avec laquelle Hollande, Valls, Taubira et l’ensemble du gouvernement ont décidé d’intimider tous les salariés qui se battent pour leurs droits et leurs emplois. Le but est de faire peur aux syndicalistes pour qu’ils cessent de se battre pendant que le gouvernement prépare la suppression de la moitié du Code du travail”.
      Voilà pour le soutien du PS aux syndicalistes.

      “Hollande, Valls, Taubira et l’ensemble du gouvernement ont décidé d’intimider tous les salariés qui se battent pour leurs droits et leurs emplois. Le but est de faire peur aux syndicalistes pour qu’ils cessent de se battre”
      CGT goodyear d’amiens-nord, 2016

      Le Gouvernement PS est aussi celui qui, via son ministre de l’Interieur Bernard Cazeneuve, a profité de l’émotion suscitée par plusieurs horribles attentats, qu’il a été incapable d’empêcher, pour renforcer son arsenal repressif, arsenal repressif dont toute la gauche sérieuse avait alerté qu’il serait rapidement utilisé contre l’opposition politique, ce qui n’a pas manqué d’arriver. En France, des tas de personnalités politiques de premier plan et des militants, sont en train d’être convoqués par la police pour s’être opposés au soutien inconditionnel du gouvernement français au massacre de masse commis par Israël contre la population gazaouie. On peut notamment citer : Anasse Kazib, Mathilde Panot, Rima Hassan, un responsable CGT… Ces convocations, voire pour certains ces condamnations, ont pu être faites sur la base de la loi Cazeneuve, intégrée dans le code pénal en 2014 et passible de 5 ans de prison et de 75 000 euros d’amende.

      Sur la destruction des droits des travailleuses et des travailleurs, Raphaël Glucksmann, qui accompagnait son père, fidèle soutien de Nicolas Sarkozy, à ses meetings en 2007, est aussi comptable de son propre bilan. Il fut en effet, de 2009 à 2012, le conseiller spécial du dictateur néolibéral géorgien Mikhaïl Saakachvili. Sa politique parle d’elle-même : suppression du salaire minimum, licenciement de 60 000 fonctionnaires, abaissement de l’impôt sur les dividendes à 5%…

      Si le Rassemblement national est l’ennemi des travailleuses et des travailleurs, il n’est malheureusement pas le seul. Les macronistes et les socialistes le sont aussi.

      Les rares acquis sociaux obtenus sous des gouvernements socialistes sont avant tout le fruit de luttes sociales et pas de la bonne volonté des gouvernements en question. Et pour cause, de nombreux autres acquis sociaux ont été obtenus sous des gouvernements de droite : salaire minimum, accords de Grenelle, droit à l’avortement, RSA, prime d’activité…

      Pourtant cela n’a pas empêché la sempiternelle rengaine du chantage à l’extrême droite et du besoin “d’union”. Edwy Plenel, iconique journaliste de Médiapart, est allé jusqu’à comparer ces quelques jets d’oeufs à “la violence stalinienne” (dont on croit utile de rappeler qu’elle fit entre 3 et 20 millions de morts…) et qui “fit le jeu du nazisme”. Dans le même genre l’oubliée ancienne ministre de la culture PS Aurélie Filippetti tente de faire peur en montrant les rassemblements fascistes ayant eu lieu en Italie ces derniers jours : “Ceux qui, à gauche, prennent pour cible prioritaire la gauche sociale-démocrate seront responsables de ce qui arrivera lorsque la France sera comme l’Italie, c’est à dire dans les mains de l’extrême-droite, comme sur ces images”. Vous avez bien compris les gueux ? Si les nazis arrivent au pouvoir, ce ne sera pas la faute des personnes au pouvoir depuis une quinzaine d’années mais de celles qui n’ont pas voulu de Glucksmann. Filippetti oublie également que l’on a vu le même genre de rassemblements néonazis en France sous Macron, parfaitement autorisés. La différence avec l’Italie de Meloni c’est qu’en Italie les rassemblements de gauche ne sont pas systématiquement pris d’assaut par la police et/ou interdits.

      Mais quel intérêt d’arriver au pouvoir si c’est pour y arriver avec Glucksmann ? Est-ce intéressant pour les travailleuses et les travailleurs d’avoir un nouveau gouvernement Hollande ? Un nouveau gouvernement Macron ? Au seul prétexte que ces derniers seraient labellisés “de gauche” ? Pour ensuite pleurnicher pendant 5 ans en disant que “ah mais ce n’est pas la VRAIE gauche” ?
      Aurore Lalucq, députée européenne Place Publique qui soutient la liste PS-Place publique de Glucksmann aux européennes, a par exemple déclaré : “On ne fracture pas la gauche, notre adversaire c’est le Rassemblement national”. Mais il est temps d’être clair : si le Rassemblement national est l’ennemi des travailleuses et des travailleurs, il n’est malheureusement pas le seul. Les macronistes et les socialistes le sont aussi.

      La liberté de manifester : parlons-en !

      En France, la liberté de manifester est gravement menacée. De toute évidence, elle n’est pas menacée par les manifestantes et les manifestants qui jettent un peu de peinture mais par le pouvoir d’Etat et son immense arsenal répressif. Amnesty International alerte régulièrement à ce sujet.

      Après son expulsion, Raphaël Glucksmann a déclaré : “nous on est des démocrates de combat, des démocrates jusqu’au bout des ongles et on exclut a priori toutes formes de violences physiques”. Mais est-ce si vrai, que les socialistes et les apparatchiks affiliés au PS “excluent à priori toutes formes de violences physiques” ?

      Est-ce si vrai, que les socialistes et les apparatchiks affiliés au PS “excluent à priori toutes formes de violences physiques” ?

      Car ces graves atteintes au droit de manifester, par la violence physique, ont commencé à prendre une ampleur très importante lors du dernier gouvernement PS.

      Ce fut en particulier le cas lors des protestations contre la Loi Travail en 2016. Une mission civile d’information avait mené une enquête approfondie sur la répression policière qui s’était exercée. Voici ce qu’en disait Reporterre : “Le rapport confirme que l’action de maintien de l’ordre a pris en France un tour très dangereux, qui menace l’intégrité physique de nombreux citoyen(ne)s pacifiques, parfois de mineurs et même d’enfants. L’usage des lanceurs de balles de défense est devenu courant alors qu’il devrait être exceptionnel, voire interdit. Les tirs tendus de grenades se multiplient de manière inacceptable. L’utilisation de policiers en civil non identifiables pour des actions d’interpellation ou de répression est devenue systématique. Le non-respect du droit des journalistes à couvrir sans crainte les événements est devenu habituel. De nombreux indices conduisent de surcroît à penser que le maintien de l’ordre est conduit de façon à exciter les violences, dans l’intention de détourner l’attention de l’opinion publique des questions que posent les manifestant(e)s.”

      “L’action de maintien de l’ordre a pris en France un tour très dangereux, qui menace l’intégrité physique de nombreux citoyen(ne)s pacifiques, parfois de mineurs et même d’enfants.”
      REporterre à propos du rapport de la mission d’enquête civile sur les violences policières pendant le mouvement de 2016 contre la loi travail

      C’est autrement plus grave qu’un jet de peintures.
      Mais la violence physique contre les manifestants a atteint un point paroxystique en 2014 avec la mort d’un manifestant de 21 ans, Rémi Fraisse, tué à la suite d’une intervention de gendarme à Sivens dans le Tarn, ce qui aurait dû, dans un gouvernement démocratique normal, conduire, à minima, à la démission du gouvernement. Il n’en a rien été. Au contraire, le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, était allé jusqu’à déclarer : “Ce ne sont pas les attentats qui m’ont fait gagner le respect de mes hommes, mais bien Sivens.”

      Evidemment, “la violence physique” de l’Etat ne se limite pas à la violence contre les manifestants. Là encore le PS a une responsabilité toute particulière. Bernard Cazeneuve, toujours lui, a eu le culot monstre de déclarer : “Solidarité avec Raphaël Glucksmann. Qui ne voit où des semaines, des mois, des années d’outrances, de démesure, d’invectives, de violence, conduisent notre démocratie” Mais n’est-ce pas lui qui est responsable “d’années de violence” ?
      En février 2017, Bernard Cazeneuve, alors Premier ministre de Hollande, a fait voter une loi qui, comme l’explique Le Monde, a “modifié le cadre de la légitime défense des policiers en leur permettant de tirer sur les véhicules en mouvement”. Ce permis de tuer a eu un effet très concret en multipliant par cinq le nombre de tirs mortels de la police. C’est en vertu de cette loi qu’un policier s’est cru autorisé à abattre Nahel M, 17 ans, à Nanterre, en juin 2023.

      “Ce ne sont pas les attentats qui m’ont fait gagner le respect de mes hommes, mais bien Sivens”
      Bernard cazeneuve, ancien ministre de l’intérieur du gouvernement socialiste de François hollande

      Sous Macron, ancien ministre du gouvernement PS de François Hollande, les violences contre les personnes racisées et les violences contre les manifestants n’ont pas cessé, bien au contraire, on se souvient des Gilets Jaunes et des protestations pour Nahel… Elles ont donc, naturellement, continué hier lors du 1er mai.

      Se faire nasser contre un mur puis matraquer, éclater le crâne par la police lorsque l’on manifeste est autrement plus dangereux pour la démocratie (et plus douloureux) que quelques jets de peinture envers un candidat détesté. Pourtant, la classe médiatique et politique ne s’en émeut aucunement.

      Avant le 1er mai, Raphaël Glucksmann qui trouve inacceptable d’être expulsé d’une manifestation, avait lui,demandé à ce que les manifestantes et manifestants de Sciences Po Paris, en lutte contre le massacre à Gaza, soient expulsés.

      La liberté de manifester c’est pas pour les autres !

      Ces types qui disent aimer le débat démocratique, qui “condamnent la violence”, ne sont pas moins violents que ceux qui envoient deux jets de peinture. Ils le sont dix fois plus. Simplement ils délèguent leur violence aux CRS d’extrême droite qu’ils nous envoient quand on proteste.

      ROB GRAMS

    • Ce sont aussi les mêmes qui ont fait passer l’apologie du terrorisme dans le droit commun en 2014, parfaite loi scélérate qui permet en ce moment de multiplier les procédures contre les soutiens à la Palestine :
      https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/04/30/comprendre-les-zones-de-flou-autour-du-delit-d-apologie-du-terrorisme_622986

      En 2014, la loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme transfère le délit d’apologie du terrorisme dans le code pénal. Selon l’article 421-2-5, la peine encourue, cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende, est allongée à sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende si les faits sont commis via Internet. Le passage du domaine de la liberté de la presse à celui du droit commun facilite le placement en garde à vue ou les procédures de comparution immédiate.

    • Macron est à la fois le produit et le soutier du PS Hollandais, non ?

      Hollande pourrait dire « je suis ton père » ou s’appeler Palpatine, mais El Khomri c’était déjà Macron, la vente d’Alstom aussi, et j’en passe...

      En vrai, c’était déjà lui. Il opère depuis plus de 10 ans.

      En 2017 déjà, @biggrizzly citait le cru 2015 des macronades anti-prudhom https://seenthis.net/messages/629581

  • Visualisez la sécheresse historique qui frappe les #Pyrénées-Orientales depuis deux ans
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/04/12/visualisez-la-secheresse-historique-qui-frappe-les-pyrenees-orientales-depui

    (...) ce sont précisément ces dépressions méditerranéennes qui manquent à l’appel depuis le printemps 2022 et qui expliquent que le département ne connaisse quasiment plus d’épisodes humides notables.

    [...]

    Ainsi, le climat de Perpignan « se rapproche aujourd’hui de celui que connaissait Valence [Espagne] avant le réchauffement climatique », explique l’organisme. A savoir un climat « chaud et plus sec, semi-aride, avec des précipitations pouvant être tout de même violentes, notamment à l’automne ».

    #Aude #sécheresse #climat #Méditerranée #Désertification

    • Sécheresse dans les Pyrénées-Orientales : « Cette fois, c’est du brutal »
      Par Martine Valo (Pyrénées-Orientales, envoyée spéciale)
      https://www.lemonde.fr/planete/article/2024/04/22/secheresse-persistante-dans-les-pyrenees-orientales-cette-fois-c-est-du-brut

      REPORTAGELe département subit depuis deux ans un manque d’eau structurel. La faible ressource contraint les agriculteurs à adapter leurs pratiques, et pourrait conduire à revoir l’aménagement du territoire.

      Daniel Aspe saisit la bouteille en plastique avec un goulot découpé et s’allonge sur le sol de la forêt. Le maire d’Escaro, dans les Pyrénées-Orientales, plonge l’objet usé dans le regard creusé en face de l’arrivée d’eau qui alimente son village, et chronomètre le temps qu’il faut pour recueillir 2 litres : quatorze secondes. Il se livre alors à un calcul qu’il connaît bien, multipliant les secondes par vingt-quatre heures : le débit s’avère encore un peu trop juste pour la consommation journalière des 80 habitants. « Bien que nous ne nous lavions pas pour économiser l’eau », déclare en plaisantant l’élu pour surmonter son inquiétude.

      En cette fin de journée d’avril, le soleil éclabousse d’or les flancs des montagnes. Quelques filaments de neige zèbrent les sommets, tandis que, plus bas, la végétation méditerranéenne fait de la résistance. De-ci, de-là se dressent des squelettes de genêts et des chênes verts, si coriaces et pourtant morts de soif. Avec la tramontane de ces derniers jours, le service départemental d’incendie et de secours a averti : le risque d’incendie est maximal.

      Car si le panorama saturé de lumière est magnifique, il demeure quasi immuable : depuis deux ans, les nuages ne font que passer subrepticement, sans s’arrêter, des hauts cantons jusqu’à la plaine du Roussillon. Le déficit de pluie atteint 60 % certains mois, et celui de neige 75 % en 2023. Les arrêtés préfectoraux restreignant les usages de l’eau se succèdent sans discontinuer depuis juin 2022.

      « On positive »

      Pour Escaro, le vrai problème se pose l’hiver, car, du 15 avril au 15 octobre, la commune reçoit de l’eau du canal de Nyer. Le reste du temps, l’ouvrage, privé, est destiné à produire de l’hydroélectricité. Le maire, un ingénieur à la retraite, n’est d’abord pas très enthousiaste à l’idée d’évoquer une fois encore les pénuries et les camions-citernes venus remplir son château d’eau une dizaine de fois cet hiver. Question d’image pour l’ancien village minier. Dès février, quatre autres communes des Pyrénées-Orientales étaient ravitaillées ainsi, tandis qu’une quarantaine d’autres sont surveillées de très près.

      Daniel Aspe prend finalement le temps de décrire ses actions de sensibilisation auprès de ses administrés, leurs efforts communs de sobriété et leur traque des fuites. Sous le château d’eau est installée une citerne souple – une de celles qu’utilisent les pays quasi désertiques – pour ne pas perdre la moindre goutte d’eau en cas de trop-plein. Elle sert à un couple de maraîchers et à quelques chevaux. « On positive », assure le maire.

      En aval, le château de Thorrent, flanqué de ses deux tours moyenâgeuses, est alimenté par une source depuis plus de mille ans. Vice-président du Parc naturel régional des Pyrénées catalanes et maire de Sahorre (400 habitants), Olivier Gravas (divers gauche), sa famille, et ses 170 brebis en dépendent. « Je suis l’un des rares bergers nés à Neuilly-sur-Seine [Hauts-de-Seine], se présente-t-il en riant. Et peut-être l’un des premiers réfugiés climatiques français si la source se tarit. » L’éleveur d’agneaux bio appréhende la saison d’estive qui approche : y aura-t-il de quoi nourrir et abreuver son troupeau sur les contreforts du Canigou ?

      Un territoire « avec beaucoup d’atouts »

      « Les brebis vont avoir vite fait le tour du propriétaire, soupire-t-il. Voilà bien trente ans que le réchauffement se fait sentir ici, mais cette fois, c’est du brutal, deux des sources de la rivière Rotja sont en train de faiblir. » Il plaide pour que le département devienne un territoire pilote dans le contexte climatique actuel. « Il a beaucoup d’atouts : des réserves naturelles, le massif du Canigou qui est labellisé “Grand site de France”, il produit à près de 40 % en bio, dans des petites exploitations diversifiées », explique Olivier Gravas. « Pourquoi ne pas y mettre quelques millions d’euros pour expérimenter des solutions, avant que la sécheresse ne rattrape l’Aude, l’Hérault… ? », propose ce maire, qui envisage de stocker de l’eau dans une ancienne galerie minière. Cet adhérent de la Confédération paysanne ne s’estime pas le plus mal loti.

      En descendant vers la plaine du Roussillon, dans de nombreuses communes, des panneaux rappellent la situation de crise, incitent à économiser la ressource ou indiquent les jours de tours d’eau pour les agriculteurs. Néanmoins, beaucoup d’entre eux répètent qu’ils se refusent à baisser les bras.

      A Estagel, Galdric Bareil produit les vins bio du Domaine Pons Gralet. « Je ne me plains pas. J’ai un confrère qui pense tout arrêter, confie-t-il. Moi, je m’interroge… On ne sait vraiment pas où on va. » Depuis plusieurs années, les exploitants des environs se sont mis à irriguer leurs vignes. « Pour moi, c’est une aberration, affirme le viticulteur de 31 ans. Ce sont ces parcelles qui ont le plus souffert l’été 2023 lorsque l’arrêté préfectoral a imposé de cesser le goutte-à-goutte. » Et de poursuivre : « C’est plutôt facile de faire du vin bio dans les Pyrénées-Orientales : il y a beaucoup de soleil, peu d’humidité, et donc peu de plantes concurrentes entre les pieds des ceps, peu de champignons, de maladies. » Alors il veut y croire encore. Que planter d’autre de toute façon ? Même les olives – une culture traditionnelle qui fait son retour ici – demandent plus d’eau que le raisin. Galdric Bareil vient cependant d’arracher une de ses vignes qui datait de 1948. « La sécheresse a accéléré sa fin », glisse-t-il.

      Non loin de là, le lit du Verdouble, totalement à sec, est envahi par la végétation. Il se jette habituellement dans l’Agly, l’un des trois petits fleuves côtiers du département, qui ne parvient plus à couler jusqu’à la mer : faute de débit, il s’infiltre en chemin dans le sol karstique. Le niveau des trois grandes retenues a beaucoup baissé. Fin mars, à la sortie des mois de recharge donc, celle de Vinça plafonnait à 12 millions de mètres cubes alors qu’elle peut en contenir 24,5 ; celle de Villeneuve-de-la-Raho était à 7,9 millions mètres cubes au lieu de 17,5. Pire encore, à l’Agly, il était indiqué un remplissage de 10,8 mètres cubes sur les 27,5 possibles, plus rien n’en sort pour alimenter les canaux d’irrigation.

      « C’est devenu un cimetière »

      Du côté de Rivesaltes et d’Espira-de-l’Agly, la sécheresse est donc à son comble. Denis Basserie regarde avec tristesse les branches brunies et recroquevillées de ses abricotiers, dont la majorité est grillée. « C’était un verger jeune, magnifique, soupire-t-il. C’est devenu un cimetière, comme si vous cultiviez des statues ! Je n’ai pas encore eu le courage de les arracher. » Il estime avoir perdu entre 10 et 12 hectares de ses cultures de vignes et de fruits. Lui qui a des responsabilités dans les instances agricoles – notamment d’aménagement foncier – et à la fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles s’inquiète pour ceux qui s’apprêtent à prendre leur retraite et dont les terres perdent de la valeur.

      « J’ai investi pour commencer une irrigation de résilience mais, depuis l’été, on est passé de très peu à rien. Pourtant, je continue à payer 15 000 euros de redevance d’eau », témoigne l’exploitant de 43 ans. Denis Basserie en veut à l’Etat qui ne mesurerait pas, selon lui, la gravité de la situation dans la vallée de l’Agly, et dénonce les assurances qui ne prennent en compte que la perte des récoltes, pas celle des arbres et des vignes mortes. Selon sa propre estimation, 9 000 hectares de cultures risqueraient d’être arrachés.

      Depuis des siècles, les agriculteurs d’ici ont pensé pouvoir compter sur les ressources des Pyrénées que 3 000 kilomètres de canaux conduisent dans l’est du territoire. C’est l’une des raisons pour lesquelles ils avaient refusé, en 2011, l’arrivée d’Aqua Domitia – un gros tuyau qui délivre de l’eau du Rhône jusque dans l’Aude. Aujourd’hui, ils demandent l’extension de cet ouvrage.

      Jean Bertrand, chargé de l’eau à la chambre d’agriculture, organise une visite de la tête du canal de la Plaine de la Lentilla où est aménagée une prise d’eau – une « rasclose » –, en compagnie de quelques membres de l’Association syndicale autorisée (ASA) locale. L’occasion d’expliquer à quel point le travail des 200 ASA du département – des établissements publics chargés de gérer la ressource et de se la répartir – est exemplaire. Et de tirer à boulets rouges sur les militants écologistes qui défendent le maintien d’une vie aquatique. « C’est ici, à la source, que nous sommes sanctionnés par la justice à cause du fameux débit réservé que les écolos ont mis en place », dit M. Bertrand. N’est-ce pas plutôt la loi qu’ils ont fait appliquer ? « Peut-être, mais avant on coupait la rivière en cas de besoin. » Et les poissons ? « Ils se réfugiaient dans les cavités », rétorque Henri Vidal, président de l’ASA. A l’échelle de la région Occitanie, l’association France Nature Environnement préfère ne plus s’exprimer publiquement sur les rivières des Pyrénées-Orientales. La situation est devenue trop tendue.

      Henri Vidal rapporte que son organisation est passée de 600 à 1 500 adhérents en quelques années, au fur et à mesure que poussaient des lotissements bâtis sur les anciennes terres agricoles. Dans les villages, certains de ces nouveaux habitants viennent réclamer de quoi arroser leur potager. « Comme s’il suffisait de payer sa redevance pour qu’il pleuve ! », s’exclame Thierry Pujol, le secrétaire de l’ASA.

      Des stations de ski qui continuent de faire fonctionner leurs canons à neige jusqu’aux rivages de la Méditerranée où l’eau salée a commencé à pénétrer par endroits… les Pyrénées-Orientales ont un sacré défi à relever. « Nous étions un département béni des dieux, maintenant, nous travaillons avec les services de l’Etat à éviter toute guerre de l’eau, résume Nicolas Garcia, maire communiste d’Elne et président du syndicat mixte des nappes de la plaine du Roussillon, tout en vantant la sobriété et la désimperméabilisation des sols. Nous avons dix ans pour changer de logiciel socio-économique. »

      « Dépasser le déni »

      Le président de Perpignan Méditerranée Métropole, Robert Vila (qui vient de quitter Les Républicains) ne partage pas ce point de vue. « Le changement climatique ? Il faut rester prudent. Nous avons tous en tête qu’à l’avenir on reviendra à une situation hydrique plus favorable, normale, relativise l’élu, qui est aussi maire de Saint-Estève et président de la commission locale de l’eau. Moi j’ai demandé aux clubs sportifs de ma commune de réduire leurs activités, comme ça, on met en sommeil les douches, l’entretien des locaux. » Pour M. Vila, il sera sûrement possible de puiser la ressource ailleurs, dans le massif des Corbières notamment. Et parler de la sécheresse dans les médias oblige ensuite à financer des campagnes de publicité pour rassurer les touristes. Il ne faudrait pas affaiblir le premier secteur économique du département.

      « Collectivement, les élus doivent dépasser le déni, admettre que la solution passe par une mutation de notre modèle », estime pour sa part l’écologiste Agnès Langevine, vice-présidente du conseil régional. Elle s’oppose au dossier emblématique du golf de Villeneuve-de-la-Raho, un projet vieux de vingt ans dont les premiers travaux ont démarré à l’automne 2023. Et d’autres existent, qui semblent aussi anachroniques. Ainsi dans l’ancien Mas Delfau, dans le sud de #Perpignan, la mairie a annoncé la réalisation sur 18 hectares de bureaux, de logements, avec des plans d’eau au milieu, agrémentés… d’un téléski nautique.

      Philippe Poisse, militant d’Alternatiba, un mouvement de mobilisation sur le dérèglement climatique, en recense d’autres, notamment « une sorte de Puy du Fou sur le thème du cinéma ». De son côté, Valentine Lescot, du collectif d’associations Vuire, dénonce l’excès de zones commerciales, de lotissements, de friches, de résidences touristiques. « Beaucoup de retraités veulent venir s’installer, ce qui entraîne spéculation foncière et “court-termisme”, analyse-t-elle. Même si elle a des conséquences malheureuses, la sécheresse nous aide à faire réfléchir le public à l’aménagement du territoire. »

      A Escaro, Daniel Aspe organise un café citoyen le 24 avril. Il a convié trois chercheurs, signataires, comme 89 autres membres de l’université de Perpignan, d’une tribune publiée dans la presse locale plaidant « pour un territoire habitable et résilient », malgré un #stress_hydrique qui pourrait devenir la norme.

      #Pyrénées-Orientales #climato_sceptiques

  • Derrière le succès de Blablacar, un contrat secret et des économies d’énergie surévaluées
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/04/06/derriere-le-succes-de-blablacar-un-contrat-secret-et-des-economies-d-energie


    Les locaux de Blablacar, à Paris, en septembre 2015. PATRICK KOVARIK / AFP

    L’entreprise de #covoiturage a engrangé plusieurs dizaines de millions d’euros depuis 2012 dans le cadre d’un mécanisme d’obligations environnementales approuvé par l’Etat. Une manne longtemps restée opaque, et qui s’appuie sur des calculs parfois fantaisistes.

    Pratique, écologique et même depuis peu rentable : #Blablacar, qui revendique plus de vingt millions d’inscrits en France, est érigé en modèle de start-up innovante. « Le leader mondial du covoiturage est Français : c’est une fierté ! », s’émerveillait Emmanuel Macron en 2022. Mais, pour en arriver là, la #start-up a profité d’un discret soutien avalisé par l’#Etat, à hauteur de plusieurs dizaines de millions d’euros par an, selon les informations du Monde. Une #rente opaque dont Blablacar a été le bénéficiaire quasi exclusif pendant une décennie et continue de profiter aujourd’hui.
    L’histoire remonte à 2012. La plate-forme, alors baptisée Covoiturage.fr, cherche encore son modèle économique après six ans d’existence. Une manne inespérée lui est alors proposée par un grand groupe français : Total.
    La compagnie, devenue depuis TotalEnergies, doit se conformer à une obligation environnementale imposée par l’Etat à tous les fournisseurs d’énergie. Le pétrolier doit financer chaque année un certain nombre d’actions favorisant la sobriété énergétique, dont l’efficacité est mesurée par des #certificats_d’économies_d’énergie (CEE). Ce système de #pollueur-payeur l’oblige à rechercher auprès de structures agréées par l’Etat des « gisements » de CEE potentiels, comme des travaux d’isolation, des installations de chaudières performantes, des dispositifs de fret ferroviaire…

    https://justpaste.it/c0ouj

    Tout ça pour des trajets couteux où sous la bienveillance obligée des « évaluations » la marchandisation règne.

    #voiture #entreprise #capitalisme_de_plateforme

  • Des élus d’un CSE de Randstad soupçonnés d’avoir détourné plus d’un million d’euros
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/03/25/des-elus-du-cse-de-randstad-soupconnes-d-avoir-detourne-plus-d-un-million-d-

    Des élus d’un CSE de Randstad soupçonnés d’avoir détourné plus d’un million d’euros

    Treize représentants du personnel de l’entreprise d’intérim sont soupçonnés d’avoir bénéficié de remboursement de frais de déplacements exagérés, voire complètement fictifs.
    [...]

    https://jpst.it/3EnyN

    #organisation_mafieuse #collaboration_de_classe #CSE_verreux

    Malgré les poses outragées de circonstance, voilà des « représentants du personnel », comme aiment à les façonner le patronat.

    Tiens, pendant qu’on y est, voici un petit rappel (qu’aurait pu évoquer le Monde ) pour saisir comment la culture d’entreprise est susceptible de se refléter dans les « instances représentatives du personnel » :

    Le fisc réclame plus de 70 millions d’euros à Randstad | L’Echo
    https://www.lecho.be/entreprises/services/le-fisc-reclame-plus-de-70-millions-d-euros-a-randstad/10487930.html
    https://images.lecho.be/view?iid=Elvis:AnTdW734KqNAutYqJH-nT1&context=ONLINE&ratio=16/9&width=640&u=1692773103000

    Une agence du groupe néerlandais Randstad à Bruxelles. ©Tim Dirven
    Lars Bové
    23 août 2023 01:00

    L’ISI reproche au géant du travail intérimaire d’avoir « exfiltré » des bénéfices de la Belgique vers la Suisse pendant des années.

    L’Inspection spéciale des impôts (ISI) s’attaque aux sociétés belges du spécialiste du travail intérimaire Randstad. L’ISI reproche au groupe néerlandais d’avoir mis en place un montage fiscal artificiel pour réorienter vers la Suisse les bénéfices réalisés par les sociétés Randstad dans notre pays. Fort d’un accord très favorable passé avec le fisc suisse, le groupe néerlandais semble ainsi n’avoir payé pratiquement aucun impôt sur cette manne qui, depuis des années, est canalisée vers la Suisse.
    [...]

    .

  • Open data publique : « On voit les limites dès que les données pourraient remettre en cause le pouvoir établi »
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/03/05/open-data-publique-on-voit-les-limites-des-que-les-donnees-pourraient-remett

    Cofondateur de la coopérative Datactivist, spécialisée dans l’ouverture des données notamment dans le secteur public, Samuel Goëta est maître de conférences associé à Sciences Po Aix. Il vient de publier Les Données de la démocratie. Open data, pouvoirs et contre-pouvoirs (C & F éditions, 2024), un ouvrage dans lequel il développe un bilan critique autour des réussites et des limites du mouvement des données ouvertes, près de huit ans après la loi Lemaire, qui a imposé aux administrations d’ouvrir « par défaut » leurs données.

    Malgré cette loi, seules 16 % des collectivités respectaient, fin 2022, leurs obligations en la matière, d’après le dernier état des lieux de l’observatoire open data des territoires.
    Lire l’enquête | Article réservé à nos abonnés Comment Opendatasoft est devenue l’acteur incontournable de l’ouverture des données publiques
    Où en est l’ouverture des données publiques aujourd’hui en France ?

    La situation est ambiguë. En apparence, c’est une très belle réussite : l’open data française est en tête des classements internationaux, avec un écosystème public développé et un certain nombre de fleurons d’entreprises et d’associations qui lui sont dédiés, et il y a des usages importants. Mais l’ouverture des données en France est bâtie sur une culture de la transparence assez faible. Celle-ci remonte à l’accès aux documents administratifs, un droit peu connu qui date d’une quarantaine d’années, souvent contourné par les administrations : environ 80 % des demandes ne reçoivent aucune réponse.

    Or, l’open data, c’est mettre à disposition volontairement des jeux de données. Il y a une open data à double vitesse, entre celui qui va intéresser les décideurs pour innover, et celui qui va titiller les élus. On voit ces limites dès qu’on s’intéresse aux subventions, aux données de la commande publique… En clair, dès que ces données pourraient remettre en cause le pouvoir établi. C’est un écosystème fragile qui s’appuie sur une volonté politique, et qui pourrait facilement s’effondrer.
    Comment expliquer la mise en œuvre difficile des obligations nées de la loi Lemaire ?

    A la suite de la loi pour une République numérique de 2016, peu de moyens ont été mis en place. Il y a eu une petite aide à l’association OpenDataFrance. Celle-ci, comme Etalab [un département de la direction interministérielle du numérique, la dinum, chargé de l’ouverture des données publiques], a fait de l’accompagnement – mais pas à l’échelle d’une ouverture des données « par défaut ». Les moyens qu’ont mis les collectivités ont donc beaucoup dépendu de la présence d’une impulsion politique, d’un peu de moyens, d’un intérêt… et, souvent, des bonnes volontés de quelques agents qui ont fait ça sur leur temps libre ou en marge de leurs missions, avec peu de soutien hiérarchique. Cela a accentué les fractures territoriales.

    Par ailleurs, le soutien politique est assez intermittent. Il y a eu une sorte de désintérêt après la loi pour une République numérique. Mais au moment de la pandémie, la question de l’open data est devenue centrale : toutes les décisions étaient prises avec des indicateurs, et il y a aussi eu une vraie demande. Le rapport du député Bothorel, paru fin 2020, a permis de donner une nouvelle impulsion, mais celle-ci n’est plus très claire. Quand on regarde la feuille de route de la Dinum, l’impératif est celui de l’usage des données par l’administration, l’ouverture de celles-ci étant vue comme un acquis du passé. Or c’est encore un chantier important. On manque notamment d’impulsion thématique, comme ce qui s’est passé avec le point d’accès national aux données de transport. Dès lors qu’il y a un usage pensé des données ouvertes qui est proposé, les acteurs vont plus facilement entrer dans la démarche.
    Quels défis identifiez-vous pour favoriser l’usage de l’open data ?

    On a fait de l’open data en pensant qu’en claquant des doigts, des gens allaient s’en servir. Mais il faut aussi aller chercher les usagers potentiels. La moitié du temps de travail d’un responsable d’open data, c’est d’informer.
    Testez votre culture générale avec la rédaction du « Monde »
    Découvrir

    Il y a plusieurs autres sujets. Le premier, c’est de permettre de trouver les bonnes données quand elles existent, ce que j’appelle la « découvrabilité ». Les jeux de données ne sont pas toujours nommés de manière intelligible. Il y a aussi un investissement à faire dans la standardisation des données, en passant par des règles communes pour le nommage et l’organisation des fichiers, comme celles de schema.data.gouv.fr.

    Ensuite, il y a la question de la documentation, c’est-à-dire une description du contenu du jeu de données. Avec Etalab, nous avons calculé que près de six jeux de données sur dix publiés sur data.gouv.fr contenaient une documentation de moins de 1 000 caractères, et un peu moins d’un quart ont une longueur inférieure à celle d’un SMS.

    Enfin, même quand les données existent, l’utilisateur qui cherche à s’en saisir se trouve souvent confronté à un problème de qualité. Je ne parle pas de soucis liés à un usage qui n’avait pas été prévu à l’origine, mais de lacunes dans les données. Par exemple, il y a un nombre encore très important de marchés publics dont le montant renseigné est « zéro » parce que les producteurs estiment qu’il y a secret des affaires. Ces montants sont donc inutilisables. Une solution serait de favoriser les échanges entre les producteurs et les réutilisateurs, ces derniers étant souvent laissés sans réponse.

    Raphaëlle Aubert et Léa Sanchez

    #Open_data #Samuel_Goëta

  • Comment Opendatasoft est devenue l’acteur incontournable de l’ouverture des données publiques
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/03/05/comment-opendatasoft-est-devenue-l-acteur-incontournable-de-l-ouverture-des-

    Malgré un budget doublé cette année, passant d’un à deux millions d’euros, la plate-forme étatique data.gouv.fr a cumulé un retard important face à l’offre privée d’Opendatasoft. « Pendant longtemps, data.gouv.fr s’est positionnée uniquement comme catalogue central de données françaises », analyse Samuel Goëta, maître de conférences à Sciences Po Aix et cofondateur de Datactivist, un cabinet de conseil spécialisé dans l’open data et auteur de l’ouvrage Les Données de la démocratie (2024, C & F Editions).

    « Il n’y a sûrement pas eu les mêmes investissements sur data.gouv.fr que ce qu’Opendatasoft a pu faire sur ses outils », soutient Christian Quest, spécialiste des données, présent à Etalab de 2014 à 2019 et revenu en tant que consultant en 2023. « Porté par deux personnes pendant les premières années (…), data.gouv.fr était très bien fichu mais ça avait un côté plus artisanal », se rappelle-t-il.

    En 2012, Etalab avait même décerné un prix à Opendatasoft. « Au fond, ils s’étaient dit : “en fait c’est ça qu’il faudrait qu’on arrive à faire”… mais avec beaucoup moins d’investissements », ironise Christian Quest. Jean-Marc Lazard préfère mettre en avant la « complémentarité » de sa solution avec celle de l’Etat.

    L’alternative publique compte toutefois plusieurs utilisateurs exclusifs : le ministère de l’intérieur et des outre-mer, celui de la justice, mais aussi des communautés d’agglomération comme le Grand Annecy ou des communes comme Bar-le-Duc.

    L’offre de la Dinum s’est récemment diversifiée en proposant des portails thématiques avec les sites transports.data.gouv.fr, adresse.data.gouv.fr et, plus récemment, meteo.data.gouv.fr. Dans les prochains mois paraîtra ecologie.data.gouv.fr. Dans la feuille de route 2024 de la plate-forme publique, de nombreuses évolutions prévues rappellent d’ailleurs les fonctionnalités d’Opendatasoft.

    Ces améliorations sont suivies de près par les administrations. Le ministère de la culture se dit prêt à faire évoluer ses choix techniques « si le rapport coût/efficience du service rendu s’avérait favorable ». La publication directe grâce aux outils de data.gouv.fr permettrait de réaliser des économies importantes pour les administrations, précise la Dinum. D’autant plus que ses équipes doivent « moissonner » quotidiennement les données des portails externes pour les centraliser sur data.gouv.fr – une opération coûteuse et complexe.

    Et n’oublions pas que le libre n’est pas forcément gratuit. La lberté a un prix.

    Le choix de l’open source intégral reste rare, souvent le fruit de volontés individuelles, d’agents ou d’élus. Il concerne surtout des régions ou des métropoles, comme celle du Grand Lyon. Aidée par l’arrivée d’un « doctorant mouton à cinq pattes », l’équipe technique de l’agglomération est devenue l’un des précurseurs dans la mutualisation d’une solution open source, aujourd’hui utilisée par la Nouvelle-Aquitaine et Provence-Alpes-Côte d’Azur. Si celle-ci est maintenue par un éditeur, Neogeo, l’ouverture du code garantit une indépendance : « L’avantage c’est que cette solution n’est pas une boîte noire (…) et si Neogeo fait faillite on peut récupérer toutes les sources, toute l’infrastructure logicielle », souligne Emmanuel Gastaud, responsables des données métropolitaines.

    Le Grand Lyon débourse 100 000 euros par an pour l’hébergement, la supervision et la maintenance. Il compte aussi sur le travail de 4 ou 5 équivalents temps plein. Un investissement apprécié localement – le portail abrite les données d’une vingtaine de communes du territoire – mais très éloigné des budgets « open data » de nombreuses administrations. Pour celles qui en ont un.

    Le livre de Samuel Goëta explique les raisons, problèmes et solutions de l’open data en France.
    https://cfeditions.com/donnees-ouvertes


    #Open_data #Public_privé #Logiciel_libre

  • Comment l’UE a fermé les yeux sur le refoulement illégal de migrants par la Bulgarie avant son adhésion à Schengen
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/02/26/comment-l-ue-a-ferme-les-yeux-sur-le-refoulement-illegal-de-migrants-par-la-

    Comment l’UE a fermé les yeux sur le refoulement illégal de migrants par la Bulgarie avant son adhésion à Schengen
    Par Maria Cheresheva et Ludek Stavinoha
    Des documents internes de Frontex révèlent des violations répétées. Malgré des alertes répétées, la Commission européenne salue les « résultats excellents » de la Bulgarie, qui s’apprête à rejoindre l’espace Schengen.
    Au printemps 2022, Ali, un Syrien de 16 ans, entre dans un centre d’accueil à Sofia (Bulgarie) pour demander une protection au titre de l’asile et un regroupement familial avec sa mère et ses cinq autres frères et sœurs, restés en Syrie et au Liban.Mais les choses ne se passent pas comme prévu. Au lieu de voir sa demande traitée, il est emmené dans un endroit qui, dit-il, « ressemble à une prison ». Pendant la nuit, comme une cinquantaine d’autres personnes, il est embarqué dans une voiture de la police des frontières et reconduit jusqu’à la frontière turque, à 300 kilomètres de là, sans recevoir la moindre information sur ses droits à l’asile. (...) Les témoignages de refoulements (ou pushbacks, en anglais) comme celui d’Ali sont généralement réfutés par le gouvernement bulgare. Mais de nombreux abus ont été documentés par l’organe de surveillance des droits humains de Frontex au cours des dix-huit derniers mois, selon une série de documents internes de l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes consultés par le réseau Balkan Investigative Reporting Network (BIRN) et publiés par Le Monde. Ces documents, obtenus grâce aux lois de transparence européennes, décrivent avec force détails des brutalités commises par des agents bulgares participant aux opérations de Frontex : coups de bâton, déshabillage de force, vols d’effets personnels, agressions verbales et blessures graves infligées par des chiens, etc.
    Les documents montrent également que les preuves étayant ces pratiques illégales ont été dissimulées non seulement par les autorités bulgares, mais aussi par les hauts fonctionnaires de Frontex et de la Commission européenne. Dans le même temps, l’exécutif européen saluait les « excellents » progrès réalisés par la Bulgarie en matière de gestion des frontières, facilitant l’adhésion du pays à l’espace Schengen – les contrôles aux frontières aériennes et maritimes seront levés le 31 mars, tandis que les contrôles terrestres restent en place pour l’instant.
    Les organisations non gouvernementales (ONG) de défense des droits humains locales et internationales alertent depuis de nombreuses années sur les refoulements violents en Bulgarie. Selon des données compilées par le Comité Helsinki de Bulgarie, 5 268 refoulements, touchant 87 647 personnes, auraient eu lieu au cours de la seule année 2022. Plusieurs experts affirment que la plupart des 325 000 entrées de migrants que le gouvernement bulgare revendique avoir « empêchées » depuis 2022 sont en fait des refoulements illégaux. « Ces personnes ont été interceptées à l’intérieur du pays. Nous ne parlons donc pas d’entrées empêchées, mais de retours », explique Iliyana Savova, directrice du programme pour les réfugiés et les migrants du Comité Helsinki de Bulgarie. « C’est un secret de Polichinelle que les gens sont repoussés. De tels ordres existent », admet, sous le couvert de l’anonymat, un haut fonctionnaire du gouvernement bulgare.
    Les preuves s’accumulent tellement que le Bureau des droits fondamentaux de Frontex (FRO) considère « établi » que les refoulements, « impliquant souvent des niveaux élevés de violence et d’autres traitements inhumains ou dégradants », sont « une pratique régulière de la police des frontières bulgare », selon un bilan des « rapports d’incidents graves » couvrant la période 2022-2023 obtenu dans le cadre de cette enquête.
    Pour l’Union européenne (UE), la situation est d’autant plus problématique que son agence des frontières collabore directement sur le terrain avec les forces de sécurité bulgares. Depuis 2022, dans le cadre de l’opération conjointe Terra, Frontex a déployé des équipes de gardes-frontières, des véhicules de patrouille et des caméras de thermovision pour aider les autorités bulgares dans leurs activités de surveillance aux frontières turque et serbe.
    En août 2022, un rapport inquiétant atterrit sur le bureau de Jonas Grimheden, le chef du FRO. Il émane d’un agent de Frontex qui a mené une enquête de sa propre initiative lors d’un déploiement de six mois à la frontière avec la Turquie. Il révèle que les agents de Frontex sont tenus intentionnellement à l’écart des zones où les migrants sont généralement appréhendés et repoussés. « Lorsque des situations se produisent, le collègue local reçoit les indications pour déplacer l’équipe Frontex, en évitant certaines zones, note le lanceur d’alerte. Ils ont pour instruction d’empêcher Frontex de voir quoi que ce soit, pour éviter qu’ils rédigent un rapport officiel. »
    Des membres de l’armée bulgare lors d’une visite de la chancelière autrichienne et du président bulgare à la direction régionale de la police des frontières, à Elhovo (Bulgarie), près de la frontière turque, le 23 janvier 2023.
    Pour l’eurodéputée écologiste Tineke Strik, cheffe de file d’un groupe d’eurodéputés chargé de surveiller Frontex, ces conclusions soulèvent de sérieux doutes quant à la capacité de l’agence à garantir le respect des droits humains dans le cadre de ses activités : « Il est étonnant qu’une agence de l’UE soit toujours incapable de faire respecter le droit européen après tant d’enquêtes institutionnelles, de rapports, de recommandations et d’avertissements. »Dans les mois qui suivent le rapport du lanceur d’alerte, Jonas Grimheden fait part de ses préoccupations croissantes concernant la conduite des agents frontaliers bulgares aux échelons supérieurs de Frontex, dont le siège se trouve à Varsovie.L’agence s’attache alors à restaurer sa réputation, ternie par la révélation de sa complicité dans les refoulements illégaux de migrants en Grèce. En avril 2022, son directeur, Fabrice Leggeri – qui vient de rallier le Rassemblement national en vue des élections européennes –, a été contraint de démissionner après avoir été reconnu coupable par l’Office européen de lutte antifraude d’avoir dissimulé des refoulements de bateaux de migrants en mer Egée.
    Aija Kalnaja, qui lui a succédé à la direction de Frontex pour un court intérim, semble prendre les avertissements du FRO au sérieux. En février 2023, elle exprime de « vives inquiétudes » dans une lettre adressée à Rositsa Dimitrova, alors cheffe de la direction des frontières bulgare, recommandant aux autorités du pays d’accorder au corps permanent de l’agence l’accès aux « contrôles de première ligne et aux activités de surveillance des frontières ».
    Dans sa réponse, Rositsa Dimitrova assure que « le respect des droits fondamentaux des ressortissants de pays tiers est une priorité absolue ». Disposée à organiser des séances d’information et des formations à l’intention de ses gardes-frontières, la responsable bulgare explique que chaque violation présumée des droits est examinée par une commission constituée par ses soins. Insuffisant, pour le FRO, qui préférerait un contrôle rigoureux par un « organisme indépendant opérant en dehors de la structure institutionnelle du ministère de l’intérieur bulgare ». Cinq agents ont été sanctionnés pour avoir violé leur code de conduite éthique au cours des dix premiers mois de 2023, précise aujourd’hui le ministère de l’intérieur bulgare.
    Au début de 2023, le Néerlandais Hans Leijtens est nommé à la tête de Frontex. On peut alors s’attendre à ce que ce nouveau directeur, engagé publiquement en faveur de la « responsabilité, du respect des droits fondamentaux et de la transparence », adopte une position ferme à l’égard des autorités bulgares. « Ce sont des pratiques du passé », déclare-t-il après sa nomination, en référence aux antécédents de Frontex en matière d’aide aux refoulements en Grèce.Soucieux de saisir l’occasion, Jonas Grimheden, à la tête du FRO, lui écrit deux jours après sa prise de fonctions, en mars 2023. Le courriel contient un projet de lettre « que vous pouvez envisager d’envoyer, en tout ou en partie », à Rositsa Dimitrova. La lettre rappelle les « allégations persistantes de retours irréguliers (appelés “refoulements”), accompagnées de graves allégations de mauvais traitements et d’usage excessif de la force par la police nationale des frontières à l’encontre des migrants » et demande des enquêtes indépendantes sur les violations des droits. Ce brouillon de lettre n’a jamais quitté la boîte de réception d’Hans Leijtens.
    Quelques semaines plus tard, en mars 2023, le FRO envoie un rapport officiel au conseil d’administration de Frontex, évoquant le « risque que l’agence soit indirectement impliquée dans des violations des droits fondamentaux sans avoir la possibilité de recueillir toutes les informations pertinentes et d’empêcher ces violations de se produire ».M. Leijtens a-t-il fait part aux autorités bulgares des conclusions du FRO ? Sollicité, le service de presse de Frontex explique que « les discussions directes ont été jugées plus efficaces », sans pouvoir divulguer « les détails spécifiques des discussions ».
    Une contrepartie pour Schengen ?Alors que ce bras de fer se joue en coulisses, sur la scène politique, la Bulgarie est érigée en élève modèle pour le programme de contrôle des migrations de la Commission européenne, et récompensée pour le durcissement de ses contrôles frontaliers, en contrepartie de l’avancement de sa candidature à l’entrée dans l’espace Schengen.
    En mars 2023, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, annonce un projet pilote visant à « prévenir les arrivées irrégulières » et à « renforcer la gestion des frontières et des migrations », notamment par le biais de « procédures d’asile accélérées » et d’expulsions rapides des migrants indésirables. La Commission sélectionne deux pays « volontaires » : la Roumanie et la Bulgarie.Pour mettre en œuvre le projet, la Commission accorde à la Bulgarie 69,5 millions d’euros de fonds européens, principalement destinés à la surveillance de sa frontière avec la Turquie. « Toutes les activités menées dans le cadre de ce projet pilote doivent l’être dans le plein respect de la législation de l’UE et des droits fondamentaux, en particulier du principe de non-refoulement », précise d’emblée la Commission.
    Pourtant, à ce moment-là, l’exécutif bruxellois est parfaitement conscient de la situation désastreuse des droits humains sur le terrain. Deux mois avant le lancement du projet, en janvier 2023, deux hauts fonctionnaires de la direction des affaires intérieures (DG Home) ont rencontré à Stockholm la patronne des gardes-frontières bulgares « pour discuter des préoccupations du FRO concernant les allégations de violations des droits fondamentaux », révèle un compte rendu de la réunion.Au fil de l’avancement du projet pilote, les signaux d’alerte se multiplient. En septembre 2023, Jonas Grimheden alerte une nouvelle fois le conseil d’administration de Frontex sur des « allégations répétées de (…) refoulements et d’usage excessif de la force » par les agents bulgares. Si son rapport salue la participation des agents de Frontex aux « activités de patrouille terrestre de première ligne », il rappelle que ces derniers « continuent d’être impliqués dans un nombre limité d’interceptions » de migrants.Au cours du projet, deux documents sur les « droits fondamentaux » aux frontières extérieures de la Bulgarie ont circulé au sein de la DG Home. La Commission européenne a refusé de les communiquer au BIRN, arguant que leur divulgation mettrait en péril la « confiance mutuelle » avec le gouvernement bulgare.
    La participation de la Bulgarie au projet pilote de la Commission semble avoir joué un rôle crucial pour faire avancer son projet de rejoindre Schengen – un objectif prioritaire depuis plus d’une décennie. Il coïncide en tout cas avec un changement de ton très net du côté de Bruxelles et Varsovie, qui ont dès lors largement balayé les inquiétudes concernant les mauvais traitements infligés à grande échelle aux migrants.« Les résultats sont excellents », annonce Ylva Johansson lors d’une conférence de presse en octobre 2023. La commissaire européenne aux affaires intérieures, chargée des migrations, salue les efforts déployés par la Bulgarie pour empêcher les migrants « irréguliers » d’entrer sur le territoire de l’UE, appelant à prendre la « décision absolument nécessaire » d’admettre la Bulgarie dans l’espace Schengen. Cette décision est alors bloquée depuis des mois par les Pays-Bas et l’Autriche, qui exigent des contrôles plus stricts à la frontière terrestre avec la Turquie. Quelques semaines auparavant, Ursula von der Leyen avait salué la Bulgarie, qui « montre la voie à suivre en mettant en avant les meilleures pratiques en matière d’asile et de retour ». « Faisons-les enfin entrer, sans plus attendre », avait réclamé la présidente de la Commission.
    Selon Diana Radoslavova, directrice du Centre pour le soutien juridique, une ONG sise à Sofia, la fermeture effective de la frontière avec la Turquie est indispensable à l’entrée de la Bulgarie dans l’espace Schengen. « [Les autorités] sont prêtes à tout pour respecter cette injonction, y compris au prix de violations extrêmes des droits de l’homme », estime l’avocate. « Tant que la Bulgarie coopère en bonne intelligence avec la protection des frontières et la mise en œuvre du projet pilote, la Commission regarde ailleurs », ajoute l’eurodéputée Tineke Strik.Pour défendre la candidature de Sofia à l’espace Schengen, la Commission européenne s’est appuyée sur le rapport d’une mission d’enquête rassemblant les experts de plusieurs agences de l’UE et des Etats membres, dépêchés en novembre 2023 en Bulgarie pour évaluer son état de préparation à l’adhésion. La mission n’aurait trouvé aucune preuve de violation des obligations en matière de droits humains prévues par les règles européennes, y compris en ce qui concerne « le respect du principe de non-refoulement et l’accès à la protection internationale ».
    Ce rapport n’a pas dissipé les inquiétudes de Jonas Grimheden, qui affirme que ses services font encore « régulièrement » part de leurs « préoccupations » au conseil d’administration de Frontex, « auquel participe la Commission européenne ».

    #Covid-19#migrant#migration#UE#FRONTEX#bulgarie#espaceschengen#droit#refoulement#pushback#frontiere#sante

  • Comment l’UE a fermé les yeux sur le refoulement illégal de migrants par la #Bulgarie avant son adhésion à Schengen

    Des documents internes de Frontex révèlent des violations répétées. Malgré des alertes répétées, la Commission européenne salue les « résultats excellents » de la Bulgarie, qui s’apprête à rejoindre l’espace Schengen.

    Au printemps 2022, Ali, un Syrien de 16 ans, entre dans un centre d’accueil à Sofia (Bulgarie) pour demander une protection au titre de l’asile et un regroupement familial avec sa mère et ses cinq autres frères et sœurs, restés en Syrie et au Liban.

    Mais les choses ne se passent pas comme prévu. Au lieu de voir sa demande traitée, il est emmené dans un endroit qui, dit-il, « ressemble à une prison ». Pendant la nuit, comme une cinquantaine d’autres personnes, il est embarqué dans une voiture de la police des frontières et reconduit jusqu’à la frontière turque, à 300 kilomètres de là, sans recevoir la moindre information sur ses droits à l’asile.

    « Ils nous ont fait marcher jusqu’à une #clôture équipée de caméras. Après avoir franchi la clôture, il y avait comme un canal. En même temps, ils frappaient les gens, se remémore le garçon. Ils ont tout pris et m’ont frappé dans le dos, sur la tête. Après cela, ils m’ont jeté dans le canal. » Le groupe est invité à retourner en #Turquie et ne jamais revenir.

    Les refoulements, une « pratique courante »

    Les témoignages de refoulements (ou pushbacks, en anglais) comme celui d’Ali sont généralement réfutés par le gouvernement bulgare. Mais de nombreux abus ont été documentés par l’organe de surveillance des droits humains de Frontex au cours des dix-huit derniers mois, selon une série de documents internes de l’agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes consultés par le réseau Balkan Investigative Reporting Network (BIRN) et publiés par Le Monde. Ces documents, obtenus grâce aux lois de transparence européennes, décrivent avec force détails des #brutalités commises par des agents bulgares participant aux opérations de Frontex : coups de bâton, #déshabillage de force, #vols d’effets personnels, #agressions verbales et #blessures graves infligées par des chiens, etc.

    Les documents montrent également que les preuves étayant ces pratiques illégales ont été dissimulées non seulement par les autorités bulgares, mais aussi par les hauts fonctionnaires de Frontex et de la Commission européenne. Dans le même temps, l’exécutif européen saluait les « excellents » progrès réalisés par la Bulgarie en matière de #gestion_des_frontières, facilitant l’adhésion du pays à l’espace Schengen – les contrôles aux frontières aériennes et maritimes seront levés le 31 mars, tandis que les contrôles terrestres restent en place pour l’instant.

    Les organisations non gouvernementales (ONG) de défense des droits humains locales et internationales alertent depuis de nombreuses années sur les refoulements violents en Bulgarie. Selon des données compilées par le Comité Helsinki de Bulgarie, 5 268 refoulements, touchant 87 647 personnes, auraient eu lieu au cours de la seule année 2022.

    Plusieurs experts affirment que la plupart des 325 000 entrées de migrants que le gouvernement bulgare revendique avoir « empêchées » depuis 2022 sont en fait des refoulements illégaux. « Ces personnes ont été interceptées à l’intérieur du pays. Nous ne parlons donc pas d’entrées empêchées, mais de retours », explique Iliyana Savova, directrice du programme pour les réfugiés et les migrants du Comité Helsinki de Bulgarie. « C’est un secret de Polichinelle que les gens sont repoussés. De tels ordres existent », admet, sous le couvert de l’anonymat, un haut fonctionnaire du gouvernement bulgare.

    Les preuves s’accumulent tellement que le Bureau des droits fondamentaux de Frontex (FRO) considère « établi » que les refoulements, « impliquant souvent des niveaux élevés de #violence et d’autres #traitements_inhumains_ou_dégradants », sont « une pratique régulière de la police des frontières bulgare », selon un bilan des « rapports d’incidents graves » couvrant la période 2022-2023 obtenu dans le cadre de cette enquête.

    Un lanceur d’alerte en mission discrète

    Pour l’Union européenne (UE), la situation est d’autant plus problématique que son agence des frontières collabore directement sur le terrain avec les forces de sécurité bulgares. Depuis 2022, dans le cadre de l’opération conjointe #Terra, Frontex a déployé des équipes de #gardes-frontières, des véhicules de patrouille et des #caméras_de_thermovision pour aider les autorités bulgares dans leurs activités de #surveillance aux frontières turque et serbe.

    En août 2022, un #rapport inquiétant atterrit sur le bureau de Jonas Grimheden, le chef du FRO. Il émane d’un agent de Frontex qui a mené une enquête de sa propre initiative lors d’un déploiement de six mois à la frontière avec la Turquie. Il révèle que les agents de Frontex sont tenus intentionnellement à l’écart des zones où les migrants sont généralement appréhendés et repoussés. « Lorsque des situations se produisent, le collègue local reçoit les indications pour déplacer l’équipe Frontex, en évitant certaines zones, note le lanceur d’alerte. Ils ont pour instruction d’empêcher Frontex de voir quoi que ce soit, pour éviter qu’ils rédigent un rapport officiel. »

    Pour l’eurodéputée écologiste Tineke Strik, cheffe de file d’un groupe d’eurodéputés chargé de surveiller Frontex, ces conclusions soulèvent de sérieux doutes quant à la capacité de l’agence à garantir le respect des droits humains dans le cadre de ses activités : « Il est étonnant qu’une agence de l’UE soit toujours incapable de faire respecter le droit européen après tant d’enquêtes institutionnelles, de rapports, de recommandations et d’avertissements. »

    Dans les mois qui suivent le rapport du lanceur d’alerte, Jonas Grimheden fait part de ses préoccupations croissantes concernant la conduite des agents frontaliers bulgares aux échelons supérieurs de Frontex, dont le siège se trouve à Varsovie.

    L’agence s’attache alors à restaurer sa réputation, ternie par la révélation de sa complicité dans les refoulements illégaux de migrants en Grèce. En avril 2022, son directeur, Fabrice Leggeri – qui vient de rallier le Rassemblement national en vue des élections européennes –, a été contraint de démissionner après avoir été reconnu coupable par l’Office européen de lutte antifraude d’avoir dissimulé des refoulements de bateaux de migrants en mer Egée.

    Aija Kalnaja, qui lui a succédé à la direction de Frontex pour un court intérim, semble prendre les avertissements du FRO au sérieux. En février 2023, elle exprime de « vives inquiétudes » dans une lettre adressée à Rositsa Dimitrova, alors cheffe de la direction des frontières bulgare, recommandant aux autorités du pays d’accorder au corps permanent de l’agence l’accès aux « contrôles de première ligne et aux activités de surveillance des frontières ».

    Dans sa réponse, #Rositsa_Dimitrova assure que « le respect des droits fondamentaux des ressortissants de pays tiers est une priorité absolue ». Disposée à organiser des séances d’information et des formations à l’intention de ses gardes-frontières, la responsable bulgare explique que chaque violation présumée des droits est examinée par une commission constituée par ses soins. Insuffisant, pour le FRO, qui préférerait un contrôle rigoureux par un « organisme indépendant opérant en dehors de la structure institutionnelle du ministère de l’intérieur bulgare ». Cinq agents ont été sanctionnés pour avoir violé leur code de conduite éthique au cours des dix premiers mois de 2023, précise aujourd’hui le ministère de l’intérieur bulgare.

    Une lettre jamais envoyée

    Au début de 2023, le Néerlandais Hans Leijtens est nommé à la tête de Frontex. On peut alors s’attendre à ce que ce nouveau directeur, engagé publiquement en faveur de la « responsabilité, du respect des droits fondamentaux et de la transparence », adopte une position ferme à l’égard des autorités bulgares. « Ce sont des pratiques du passé », déclare-t-il après sa nomination, en référence aux antécédents de Frontex en matière d’aide aux refoulements en Grèce.

    Soucieux de saisir l’occasion, Jonas Grimheden, à la tête du FRO, lui écrit deux jours après sa prise de fonctions, en mars 2023. Le courriel contient un projet de lettre « que vous pouvez envisager d’envoyer, en tout ou en partie », à Rositsa Dimitrova. La lettre rappelle les « allégations persistantes de retours irréguliers (appelés “refoulements”), accompagnées de graves allégations de #mauvais_traitements et d’#usage_excessif_de_la_force par la police nationale des frontières à l’encontre des migrants » et demande des enquêtes indépendantes sur les violations des droits. Ce brouillon de lettre n’a jamais quitté la boîte de réception d’Hans Leijtens.

    Quelques semaines plus tard, en mars 2023, le #FRO envoie un rapport officiel au conseil d’administration de Frontex, évoquant le « risque que l’agence soit indirectement impliquée dans des violations des droits fondamentaux sans avoir la possibilité de recueillir toutes les informations pertinentes et d’empêcher ces violations de se produire ».

    M. Leijtens a-t-il fait part aux autorités bulgares des conclusions du FRO ? Sollicité, le service de presse de Frontex explique que « les discussions directes ont été jugées plus efficaces », sans pouvoir divulguer « les détails spécifiques des discussions ».

    Une contrepartie pour Schengen ?

    Alors que ce bras de fer se joue en coulisses, sur la scène politique, la Bulgarie est érigée en élève modèle pour le programme de contrôle des migrations de la Commission européenne, et récompensée pour le durcissement de ses #contrôles_frontaliers, en contrepartie de l’avancement de sa candidature à l’entrée dans l’espace Schengen.

    En mars 2023, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, annonce un #projet_pilote visant à « prévenir les arrivées irrégulières » et à « renforcer la gestion des frontières et des migrations », notamment par le biais de « #procédures_d’asile_accélérées » et d’#expulsions_rapides des migrants indésirables. La Commission sélectionne deux pays « volontaires » : la #Roumanie et la Bulgarie.

    Pour mettre en œuvre le projet, la Commission accorde à la Bulgarie 69,5 millions d’euros de #fonds_européens, principalement destinés à la surveillance de sa frontière avec la Turquie. « Toutes les activités menées dans le cadre de ce projet pilote doivent l’être dans le plein respect de la législation de l’UE et des droits fondamentaux, en particulier du principe de non-refoulement », précise d’emblée la Commission.

    Pourtant, à ce moment-là, l’exécutif bruxellois est parfaitement conscient de la situation désastreuse des droits humains sur le terrain. Deux mois avant le lancement du projet, en janvier 2023, deux hauts fonctionnaires de la direction des affaires intérieures (DG Home) ont rencontré à Stockholm la patronne des gardes-frontières bulgares « pour discuter des préoccupations du FRO concernant les allégations de #violations_des_droits_fondamentaux », révèle un compte rendu de la réunion.

    Au fil de l’avancement du projet pilote, les signaux d’alerte se multiplient. En septembre 2023, Jonas Grimheden alerte une nouvelle fois le conseil d’administration de Frontex sur des « allégations répétées de (…) refoulements et d’usage excessif de la force » par les agents bulgares. Si son rapport salue la participation des agents de Frontex aux « activités de patrouille terrestre de première ligne », il rappelle que ces derniers « continuent d’être impliqués dans un nombre limité d’interceptions » de migrants.

    Au cours du projet, deux documents sur les « droits fondamentaux » aux frontières extérieures de la Bulgarie ont circulé au sein de la DG Home. La Commission européenne a refusé de les communiquer au BIRN, arguant que leur divulgation mettrait en péril la « confiance mutuelle » avec le gouvernement bulgare.

    « Les résultats sont excellents »

    La participation de la Bulgarie au projet pilote de la Commission semble avoir joué un rôle crucial pour faire avancer son projet de rejoindre Schengen – un objectif prioritaire depuis plus d’une décennie. Il coïncide en tout cas avec un changement de ton très net du côté de Bruxelles et Varsovie, qui ont dès lors largement balayé les inquiétudes concernant les mauvais traitements infligés à grande échelle aux migrants.

    « Les résultats sont excellents », annonce Ylva Johansson lors d’une conférence de presse en octobre 2023. La commissaire européenne aux affaires intérieures, chargée des migrations, salue les efforts déployés par la Bulgarie pour empêcher les migrants « irréguliers » d’entrer sur le territoire de l’UE, appelant à prendre la « décision absolument nécessaire » d’admettre la Bulgarie dans l’espace Schengen. Cette décision est alors bloquée depuis des mois par les Pays-Bas et l’Autriche, qui exigent des contrôles plus stricts à la frontière terrestre avec la Turquie. Quelques semaines auparavant, Ursula von der Leyen avait salué la Bulgarie, qui « montre la voie à suivre en mettant en avant les meilleures pratiques en matière d’asile et de retour ». « Faisons-les enfin entrer, sans plus attendre », avait réclamé la présidente de la Commission.

    Selon Diana Radoslavova, directrice du Centre pour le soutien juridique, une ONG sise à Sofia, la fermeture effective de la frontière avec la Turquie est indispensable à l’entrée de la Bulgarie dans l’espace Schengen. « [Les autorités] sont prêtes à tout pour respecter cette injonction, y compris au prix de violations extrêmes des droits de l’homme », estime l’avocate. « Tant que la Bulgarie coopère en bonne intelligence avec la protection des frontières et la mise en œuvre du projet pilote, la Commission regarde ailleurs », ajoute l’eurodéputée Tineke Strik.

    Pour défendre la candidature de Sofia à l’espace Schengen, la Commission européenne s’est appuyée sur le rapport d’une mission d’enquête rassemblant les experts de plusieurs agences de l’UE et des Etats membres, dépêchés en novembre 2023 en Bulgarie pour évaluer son état de préparation à l’adhésion. La mission n’aurait trouvé aucune preuve de violation des obligations en matière de droits humains prévues par les règles européennes, y compris en ce qui concerne « le respect du principe de non-refoulement et l’accès à la protection internationale ».

    Ce rapport n’a pas dissipé les inquiétudes de Jonas Grimheden, qui affirme que ses services font encore « régulièrement » part de leurs « préoccupations » au conseil d’administration de Frontex, « auquel participe la Commission européenne ».
    Cette enquête a été produite en collaboration avec le réseau Balkan Investigative Reporting Network (BIRN), qui a reçu un soutien financier de la Fondation Heinrich-Böll. Son contenu relève de la seule responsabilité des auteurs et ne représente pas les points de vue et les opinions de la fondation.

    La réponse de Frontex et de la Commission européenne

    Un porte-parole de Frontex déclare que l’agence prend « très au sérieux » les « préoccupations concernant les refoulements ». « Dans les cas où des violations sont signalées, la question est transmise au directeur exécutif et, si nécessaire, discutée lors des réunions du conseil d’administration avec des représentants des Etats membres. Toutefois, ces discussions ne sont pas publiques, conformément à notre politique de confidentialité visant à garantir un dialogue franc et efficace. »

    Dans une réponse écrite, la Commission européenne rappelle « l’importance de maintenir des éléments de contrôle solides tout en renforçant les actions de suivi et d’enquête ». « Les autorités bulgares, comme celles de tous les Etats membres de l’UE, doivent respecter pleinement les obligations découlant du droit d’asile et du droit international, notamment en garantissant l’accès à la procédure d’asile », explique un porte-parole.

    L’institution précise qu’« il a été convenu de renforcer davantage le mécanisme national indépendant existant pour contrôler le respect des droits fondamentaux », mais qu’« il est de la responsabilité des Etats membres d’enquêter sur toute allégation d’actes répréhensibles ».

    Le Médiateur européen enquête actuellement sur la décision de la Commission de refuser la communication aux journalistes de BIRN de deux documents de la DG Home sur les « droits fondamentaux » aux frontières extérieures de la Bulgarie. Dans l’attente de l’enquête, la Commission a refusé de dire si ces documents avaient été pris en considération lorsqu’elle a émis des évaluations positives du programme pilote et de la conformité de la Bulgarie avec les règles de Schengen.

    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/02/26/comment-l-ue-a-ferme-les-yeux-sur-le-refoulement-illegal-de-migrants-par-la-

    #refoulements #push-backs #migrations #réfugiés #frontières #opération_Terra

  • La loi « immigration », dernier texte d’une longue série de 118 depuis 1945
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/02/25/la-loi-immigration-dernier-texte-d-une-longue-serie-de-118-depuis-1945_62184

    La loi « immigration », dernier texte d’une longue série de 118 depuis 1945
    Par Romain Imbach, Maxime Vaudano et Stéphanie Pierre
    Le projet de loi « immigration » porté par le ministre de l’intérieur a finalement été promulgué le 26 janvier dernier, bien que le Conseil constitutionnel ait censuré plus d’un tiers des articles adoptés par les parlementaires. « Le Monde » se penche sur la centaine de réformes sur l’immigration depuis 1945.
    La « loi Darmanin » promulguée fin janvier vient compléter l’édifice du droit de l’immigration – un empilement législatif vertigineux remanié sans cesse depuis les textes fondateurs signés par le général de Gaulle au sortir de la guerre.
    Un chiffre suffit à prendre la mesure de cette hyperactivité législative : depuis 1945, la France a voté une loi sur l’immigration tous les deux ans en moyenne – sans compter les ordonnances, arrêtés, circulaires et décrets qui se sont multipliés. De droite comme de gauche, tous les ministres de l’intérieur ont voulu laisser leur empreinte sur la question.
    Pour quel résultat ? Aucun de ces textes n’est parvenu à éteindre le débat brûlant sur l’immigration né au cœur des années 1970. Même l’accélération des réformes depuis les années 1980 a été impuissante à contenir la poussée de l’extrême droite, qui s’appuie alors sur l’équation fallacieuse inventée par Jean-Marie Le Pen : « 1 million d’immigrés = 1 million de chômeurs. »
    L’amoncellement des lois n’a eu guère plus d’effets sur la réalité de l’immigration, la hausse des demandes d’asile, dans les années 2010, ou la « crise » des réfugiés, en 2015 – les flux migratoires dépendent bien plus de circonstances extérieures que des décrets.
    Cette frénésie de changement n’est pourtant pas anodine. Sans même compter le temps passé au Parlement et dans les ministères pour procéder sans cesse à des ajustements, tantôt minuscules, tantôt fondamentaux, de la politique migratoire, les acteurs de terrain (magistrats, avocats ou associatifs) peinent à suivre le rythme effréné des réformes, qui se contredisent souvent, et complexifient le droit des étrangers. Ainsi, les conditions de délivrance de la carte de résident de longue durée ont changé huit fois depuis 1984, réclamant aux étrangers cinq, dix ou quinze ans de résidence en France, et les critères de régularisation des immigrés sans papiers ont été redéfinis près d’une quinzaine de fois depuis les années 1970.
    Ces incessantes révisions de la législation ont progressivement brouillé la répartition des rôles confortable entre une droite « ferme » et une gauche « humaniste ». Car si Charles Pasqua et Nicolas Sarkozy restent probablement les champions des mesures anti-immigration, les socialistes ont entériné, voire devancé, de nombreux durcissements proposés par la droite. Une tendance largement confirmée depuis l’élection d’Emmanuel Macron.
    (....)

    #Covid-19#migration#migrant#france#politiquemigratoire#immigration#regroupementfamilial#etranger#droit#economie#fluxmigratoire#chomage#sante

  • Remaniement : l’arrivée de Kasbarian au ministère du Logement irrite la gauche et des associations
    https://www.lefigaro.fr/politique/remaniement-l-arrivee-de-kasbarian-au-ministere-du-logement-ulcere-la-gauch

    L’élu d’Eure-et-Loir, nommé jeudi après un mois sans ministre spécifiquement chargé du #Logement, a la lourde tâche d’affronter une crise historique, avec une production en berne, un allongement sans fin du nombre de ménages en attente d’un HLM, ou une saturation des structures d’hébergement d’urgence. Sa nomination au ministère du Logement, après deux anciens socialistes - Patrice Vergriete et Olivier Klein - marque un net coup de barre à droite, lui dont le principal fait d’armes en matière de logement est d’avoir fait adopter, en 2023, une loi durcissant les peines contre les squatteurs [et les locataires !!].

    Le délégué général de la Fondation Abbé Pierre, Christophe Robert, a ainsi confié à l’AFP « espérer que le nouveau ministre délégué au Logement sera plus attentif aux souffrances des mal logés et aux difficultés que connaissent nos concitoyens en matière de mal-logement qu’il ne l’a été au moment où il a porté une loi qui a fait beaucoup de dégâts ».

    « Provocation »

    Eddie Jacquemart, président de la Confédération nationale du logement, première association de locataires HLM et proche du Parti communiste, a lui estimé sur franceinfo que son arrivée était « une véritable gifle à tout le secteur du logement » et une « déclaration de guerre aux locataires ». « Une provocation », ont jugé de concert plusieurs élus de gauche. « Nommer celui dont le seul fait d’armes est d’avoir facilité les expulsions est un crachat aux visages des 4 millions de personnes mal logées et 330.000 personnes sans-abris », a ainsi dénoncé sur X la cheffe des députés LFI Mathilde Panot.

    « Guillaume Kasbarian est l’auteur de la loi la plus répressive sur les expulsions depuis des décennies », a lancé sur le même réseau le communiste Jacques Baudrier, adjoint au Logement à la mairie de Paris, tandis que le chef des sénateurs écologistes Guillaume Gontard moquait l’arrivée d’un « ministre du délogement ».

  • Lactalis perquisitionné pour des soupçons de fraude fiscale massive
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/02/06/le-geant-du-lait-lactalis-perquisitionne-pour-des-soupcons-de-fraude-fiscale


    Emmanuel Besnier, PDG de Lactalis, en mai 2022 à Boston, aux Etats-Unis. TIMOTHY A. CLARY / AFP

    Selon les informations du « Monde », l’enquête du Parquet national financier vise à déterminer si le géant laitier a échappé à l’impôt français en transférant des bénéfices dans ses sociétés en Belgique et au Luxembourg.
    Par Abdelhak El Idrissi, Adrien Sénécat et Maxime Vaudano

    Lactalis et son patron ont été perquisitionnés, mardi 6 février, dans le cadre d’un gigantesque dossier de #fraude_fiscale. Selon les informations du Monde, ces opérations ont été menées par les policiers de la Brigade nationale de répression de la délinquance fiscale dans au moins trois lieux distincts : au siège du géant laitier à Laval (Mayenne), dans ses bureaux de la tour Montparnasse (Paris), ainsi que dans l’hôtel particulier du PDG, Emmanuel Besnier, dans le 7e arrondissement de la capitale.

    Lactalis est visé par une enquête préliminaire du Parquet national financier (PNF) pour fraude fiscale aggravée et blanchiment de fraude fiscale aggravée. Son organisation fiscale lui aurait permis, selon une source judiciaire, d’éluder « plusieurs centaines de millions d’euros » d’impôts. « Les montages sont de haut niveau, très ingénieux et très sophistiqués », commente une autre source. Sollicitée, la direction de #Lactalis indique que les perquisitions « se sont déroulées sereinement », précisant qu’elles « s’inscrivent dans le cadre d’une procédure sur des faits anciens ». Selon nos informations, ils remontent à la période 2009-2020.

    L’enquête du PNF a été déclenchée en 2018 après des révélations de la presse. Coup sur coup, Mediacités, Ebdo, Les Jours et Mediapart avaient dévoilé que le premier groupe mondial de produits laitiers, fondé en 1933 à Laval, disposait de plusieurs filiales financières en Belgique et au Luxembourg, soupçonnées d’aspirer artificiellement les bénéfices du groupe pour réduire sa base taxable en France.
    En 2020, le site d’investigation Disclose évaluait à 220 millions d’euros le préjudice pour les finances publiques françaises, pour la seule période 2013-2018.

    Une enquête fiscale parallèle

    Le PNF a également reçu en 2019 une dénonciation émanant de la Confédération paysanne, qui reproche de longue date à la multinationale ses pratiques, responsables, selon elle, de détruire l’équilibre de la filière laitière. Le syndicat agricole a accusé le groupe industriel d’avoir « mis en place un système de refacturation intragroupe particulièrement complexe ainsi qu’un système d’achat fictif d’actions ».

    #holdings #famille # PNF

  • Décision n° 2023-863 DC du 25 janvier 2024 | Conseil constitutionnel
    https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2024/2023863DC.htm

    Loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration
    Non conformité partielle - réserve

    Apparemment, le Conseil Constitutionnel a décidé de mettre noir sur blanc la feuille de route du gouvernement afin de pouvoir avancer sur ses projets les plus importants du quinquennat : la suppression de tout ce qui permettra d’appliquer pour de bon la loi immigration.

    #loi_immigration

    (oui, j’ai mauvais esprit ; sous des airs de victoire de l’état de droit, je ne peux m’empêcher d’y voir une victoire à la Pyrrhus)

    • Détail des rejets, et des conformités... Ci-dessous, les saloperies déclarées conformes...

      https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/01/25/loi-immigration-ce-que-le-conseil-constitutionnel-a-censure-et-pourquoi_6212

      Les conformes :

      Article 2
      Précision sur les conditions de réacheminement à la frontière

      Article 35
      Suppression des protections contre l’expulsion pour certains étrangers

      Article 37
      Obligation de quitter le territoire français (OQTF) possible contre des étrangers protégés

      Article 39
      Création d’un fichier des mineurs non accompagnés délinquants

      Article 42
      Allongement de la durée d’assignation à résidence des étrangers

      Article 44
      Exclusion de certains étrangers de l’aide sociale à l’enfance s’ils sont visés par une OQTF

      Article 46
      Instauration d’une condition de « respect des principes de la République » pour obtenir un titre de séjour

      Article 66
      Elargissement des cas dans lesquels le bénéfice des conditions matérielles d’accueil peut être retiré

      Article 70
      Fin de la collégialité par principe des jugements de la Cour nationale du droit d’asile

      Articles 72 et 76
      Extension du recours à la visioconférence pour les audiences dans les centres de rétention

      Article 77
      Allongement à quarante-huit heures du délai du juge pour statuer dans les zones d’attente

  • Sur les réseaux sociaux, l’hypothétique « maladie X », évoquée à Davos, suscite panique et parano
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/01/20/sur-les-reseaux-sociaux-l-hypothetique-maladie-x-evoquee-a-davos-suscite-pan

    Au Forum économique mondial, une table ronde sur les risques de nouvelle #pandémie a été interprétée comme une preuve de #complot des élites mondiales.